Le bestiaire ordinaire

Traité de biologie satirique

Iguane HirsuteL'iguane hirsute (orthographié «irsute» en breton vernaculaire*) est une espèce rare mais sans être en voie d'extinction. En 2023 le rapport annuel de l'UICN classait l'hirsute comme organisme invasif dans de nombreuses zones géographiques*. C'est plutôt sa capacité à se fondre dans son environnement qui le rend difficile à apercevoir.

L'iguane hirsute est en effet parfaitement adapté aux milieux urbains et péri-urbains, où on le trouve généralement hors saison. À la mi-mars, ses écailles ternes le rendent quasiment invisible pour le quidam. Mais l'iguane est bien là, tapi dans un coin, grattant l'humus à la recherche de quelques lichens pouvant constituer un repas (l'espèce est particulièrement frugale, ce qui concoure sans doute à sa prolifération).

Ce reptile se nourrit durant la journée, mais profite de la nuit pour se rafraîchir ou explorer son territoire. Certaines études suggèrent que l'hirsute se reproduit à la faveur de la nouvelle lune, l'obscurité favorisant les rencontres chez cette espèce craintive. Cela dit, la chose n'est que très peu documentée et l'on s'en tiendra à l'état d'hypothèse : la vie sexuelle de l'iguane hirsute reste peu connue même chez les spécialistes, qui peinent parfois à distinguer les mâles des femelles.

Son régime omnivore varié est également propice à l'expansion de l'espèce. L'iguanus hirsutae (nom latin) mange ce qu'il trouve, parfois ce qu'il vole. Ainsi on l'a déjà observé pillant des nids d'oiseaux ou se nourrir de charogne. L'hirsute ne fait pas de manière !

L'espèce pratique la fumigation : au sein même de leur propre terrier, ces iguanes entretiennent des braises sur lesquelles ils répandent du laurier, du thym ou tout autre plante de saison, pourvu qu'elle soit parfumée et qu'elle ne brûle pas trop vite. L'objectif de ces rituels est encore mal compris, mais on suppose qu'ils jouent un rôle sur la sociabilité des individus et leur cycle digestif. Ces fumigations président parfois aux périodes d'hibernation bisannuelles, mais sans que cela soit systématique.

Cette variété d'iguane terrestre semble également avoir un faible pour les eaux spiritueuses : l'ethnologue britannique Edmund Hillary raconte dans ses mémoires* en avoir capturé une dizaine en 1873 sur les bords de la Tamise, en les appâtant avec du cabernet d'Anjou frelaté (sa femme en ayant acquis une pleine caisse le matin même auprès de marins français peu scrupuleux). Sur Wikipédia*, un promeneur néo-zélandais raconte avoir involontairement effrayé des hirsutes sur des chemins de traverse où ils s'étaient réfugiés pour cuver leur soûl.

En hiver, l'iguane hirsute se fait rare, la recherche de nourriture s'avérant plus consommatrice en calorie. Il est ainsi capable d'hiberner plusieurs semaines d'affilées, ralentissant son rythme cardiaque et abaissant sa température corporelle de plusieurs degrés.

L'été, c'est la période des «grands rassemblements irsutes» (bras tolpaz, en vieux celtique*). Les iguanes peuvent parcourir de centaines de kilomètres pour retrouver leurs congénères. Ils se rassemblent au cours de grandes célébrations, dont les enjeux restent flous, mais qui s'apparentent parfois à des parades nuptiales collectives : des vidéos montrent des groupes d'hirsutes bouger de façon synchronisée sur des rythmes mystiques*. Les iguanes en profitent pour marquer leur territoire et même le faucon gredin (principal prédateur des iguanes hirsutes) n'ose les attaquer pendant la messe annuelle.

* breton vernaculaire : la première description connue de l'iguane hirsute date de 1796 à Brest, où le Duc de Kermalec, biologiste amateur, en recensait une colonie de 162 individus.
* zones géographiques : particulièrement en Europe, Amérique du Nord et Australie.
* ses mémoires : «Taxonomy of London mire species», Edmund Hillary, 1884.
* Wikipédia : https://fr.m.wikipedia/wiki/iguane-hirsute
* bras tolpaz, en vieux celtique : c'est Olivier de Kersauzon, navigateur français, qui avait proposé cette traduction en 2012 lors d'une émission de télévision présentée par Laurent Ruquier, provoquant l'hilarité générale. Le terme a depuis été adopté par les spécialistes.
* rythmes mystiques : des extraits de vidéos amateurs sont utilisés dans le clip du morceau «Tek Irsute in the mountain», du DJ français David Guetta.